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Mgr Leonard

“Le sens profond du message de Mel Gibson
est de conduire à l'Eucharistie”

un article de Monseigneur André-Mutien LEONARD
Evêque de Namur

Vous aurez vu précédemment, sur ce site, mon opinion globale sur le film "La Passion du Christ". Malgré quelques réserves, elle est plutôt positive. Je n'y reviens pas.

Aujourd'hui, j'ai surtout le devoir d'exprimer ma perplexité devant l'attitude des responsables religieux, surtout catholiques, qui expriment presque du dédain à l'égard de ce film et vont même jusqu'à décourager résolument les gens d'aller le voir. Au moment où j'écris ces lignes, à savoir le lundi de Pâques 12 avril, environ cent millions de personnes ont déjà vu "La Passion du Christ" de par le monde. Avec les semaines qui passent, il est possible que ce chiffre soit doublé ou triplé. Pastoralement, cela représente une occasion exceptionnelle d'évangélisation. Y a-t-il vraiment beaucoup d'événements réels ou virtuels qui puissent toucher autant de coeurs ou pénétrer dans tant de foyers que ce film ? Combien d'éditoriaux épiscopaux, d'encycliques papales, de bulletins paroissiaux, de bandes dessinées catéchétiques, d'émissions religieuses télévisées ou radiophoniques faudrait-il, pendant des années, pour avoir la même force de pénétration ? Il n'y a guère que certaines célébrations ou certains rassemblements présidés par le Pape qui puissent, avec un message religieux, obtenir un impact comparable ? Est-ce donc le moment de faire la fine bouche, en laissant entendre que ceux qui organisent des débats (de préférence non contradictoires) sur le film, ou le discréditent en de savants panels, auraient été, eux, de beaucoup meilleurs cinéastes que Mel Gibson ? N'est-il pas plus responsable d'aller voir ce film et d'accompagner pastoralement les multitudes qui le verront ?

Ce film a ses défauts et ses limites, incontestablement. Il ne faut d'ailleurs pas lui demander d'avoir toute la pertinence conceptuelle d'une encyclique ou d'un commentaire exégétique. Mais tel quel, il est capable de donner à des foules une idée concrète de ce qu'a pu représenter la Passion de Jésus, son agonie, sa flagellation et sa crucifixion. Il laisse deviner la détresse intérieure de Jésus, abandonné par les siens et criant vers un Dieu absent, vers un Père qui se tait. Et surtout, il révèle le sens profond de cet abîme de souffrance, à savoir l'Amour de Dieu livré "pour nous les hommes et pour notre salut", ainsi que nous le professons dans le "Credo". Telle est, en effet, la pointe de ce film: tout cela, c'est pour toi et pour moi. Le texte d'Isaïe, au début du film, l'énonce clairement: "C'est par ses blessures que nous sommes guéris". L'évocation de l'Eucharistie le confirme: "Prenez et mangez, ceci est mon corps qui est livré pour vous; prenez et buvez, ceci est mon sang, le sang de l'alliance, qui va être répandu pour une multitude". Et la scène de la Pietà le ratifie une dernière fois, lorsque Marie, tenant dans ses bras le corps exsangue de Jésus, lève longuement les yeux vers la salle et tend la main vers les spectateurs, dans un geste conjoint d'offrande - "Je vous le donne" - et d'interrogation: "Qu'en avez-vous fait et qu'allez-vous en faire ?"

Quelques jours seulement après le lancement de ce film en Belgique, je suis touché par le témoignage de personnes qui me disent avoir parlé en famille de Jésus et de ce qu'il représente. Jamais ce ne serait arrivé sans cette occasion. C'est comme si un tabou avait sauté. Ne faut-il pas s'en réjouir ? Le soir de Pâques, j'ai été revoir, une seconde fois, "La Passion du Christ". Il y avait beaucoup de monde. Avant le film et après le film, des conversations se sont nouées comme on n'en a jamais dans une salle de cinéma ! Deux ouvreuses sont venues me parler. L'une d'elles était toute transformée par ces images qui, me disait-elle, ne la quitteront plus. L'autre m'a dit être touchée par les réactions des gens depuis plusieurs jours et s'est promis de voir, elle aussi, le film. Toutes deux ont bien saisi que le sens profond du message de Mel Gibson est de conduire à l'Eucharistie comme lieu où le sacrifice de la croix est aujourd'hui réellement présent de manière sacramentelle et non sanglante. Un athée avec qui je discutais en sortant m'a dit avoir bien perçu cette insistance qui le fait réfléchir, même s'il ne peut y adhérer. Oui, je le répète, le rôle des responsables pastoraux est d'être au côté de leur peuple au moment où il vit une expérience religieuse si profonde. Réservons les propos de salon pour d'autres circonstances de moindre portée.

Mgr A.M. LÉONARD,
évêque de Namur"

 

 

Mgr Léonard a prêché les Exercices spirituels de carême pour le pape et la curie romaine, en 1999.

 

Réalisation : ICS-Informatique